A PROPOS DU DOCTEUR MADELEINE FRIMAT.
Dr Chantal VULLIEZ.
Madeleine FRIMAT a été l'un des membres fondateur du GLEM, au coté du Docteur Paul Nogier.
Ce fût un personnage très particulier, qui a traversé une période de l’histoire très mouvementée avec une détermination inébranlable. Je la vois encore dans son jardin du château d’Alba, au milieu de ses rosiers, nous montrant de son index la direction à prendre.
Elle fut pour beaucoup d’entre nous la "mère spirituelle" à suivre et nous essayons de poursuivre le chemin qu’elle nous a permis d’entrevoir.
Cette femme d’une extrême finesse était à l’écoute de tous et n’oubliait jamais la petite intention qui pouvait procurer de la joie à son entourage.
Nos cabinets étaient très proches l’un de l’autre, souvent elle voyait de la lumière pointer en passant devant chez moi, alors elle montait me réprimander car il fallait que je rentre m’occuper de ma famille. Je n’allais pas lui rétorquer que je suivais son exemple…..
Quelle idée de naître un 22 juillet 1914, à Lyon Croix-Rousse ?
Quel destin de venir au monde alors que l’on n’est pas désirée par ses parents ? Quelle détermination de passer ses deux bacs et de faire ses études de médecine sans aucun soutien familial ! Quel mystère d’être née dans une famille athée avec une foi aussi intense en Dieu et en la vie ?
Sa forte personnalité lui a permis de réussir dans ses études médicales à une époque où sa famille ne voyait pas cela d’un très bon œil. A 19 ans, elle épouse un écossais, John CHRISTIE pour échapper à sa famille, dont elle divorcera en 1940. Non seulement elle aborde la seconde guerre mondiale comme femme divorcée d’un écossais, ce qui n’est bien évidemment par la meilleure situation, mais elle va en plus épouser un allemand dissident en 1941 sous le régime de Pétain !
On comprendra qu’elle a pris des risques inconsidérés en s’engageant dans l’armée de résistance du Général De Gaulle.
En 1967, elle épouse René VERJUS que tout le monde au GLEM appelle Jean Marie. Il est l’homme de la campagne, qui sait tout faire et qui aide les médecins du GLEM.
En 1974, elle fait une nouvelle folie en rachetant le château d’Alba la Romaine, suite à son coup de foudre envers ce vieux bâtiment qui aura besoin de tout son amour pour retrouver vie.
La deuxième guerre mondiale n’a fait que confirmer son don de soi pour les autres. Elle est donc à l’époque divorcée d’un écossais, et cache chez elle un allemand dissident et un enfant juif – Uri Claude Blum, âgé de 4 ans. Après la guerre, les grands-parents vont l’emmener vivre en Israël et elle ne le retrouvera que quelques mois avant qu’elle nous quitte.
Elle a reçu la médaille des justes, et une plaque porte son nom dans les jardins des justes de Yad Vashim à Jérusalem.
Elle s’engage ensuite dans le lourd métier de médecin généraliste à la montagne, en Maurienne, où elle va parallèlement élever ses 3 premiers enfants.
L’exercice médical de l’époque était héroïque avec des marches interminables dans des chemins impraticables sous la neige et la pluie, des secrets de famille à porter sans faiblir et des traitements refusés par les patients, même dans des cas graves.
Madeleine était très curieuse de toutes les thérapeutiques qui pouvaient soulager ses patients. Elle fut seule juge des résultats obtenus lors de l’application d’aiguilles, après sa lecture du « Précis de la vraie acupuncture » de Soulié de Morant.
Un journaliste écrivit un article : «Sur les montagnes, une doctoresse soigne avec des aiguilles à coudre » - qui vint aux oreilles du Docteur Paul NOGIER .
Le cabinet de ce dernier situé place Bellecour fut le premier lieu de réunion du groupe Hahnemannien autour de Pierre SCHMIDT pour les conférences d’homéopathie (de 1946 à 1971).
En 1951, Jacques Emile NIBOYET rejoint cette association qui s’appellera dorénavant le G.L.E.M (Groupe Lyonnais d’Etudes Médicales).
Jean BORSARELLO remplaçait souvent Madeleine FRIMAT à son cabinet médical lyonnais. Il en profitait pour donner des cours d’acupuncture au GLEM associé à Claude FLAMENT et Madeleine. Toujours en 1951, Paul NOGIER sauva Madeleine d’une pneumonie gravissime grâce à la nouvelle technique qu’il détenait en gestation : l’Auriculothérapie.
Dès les années 1950, Madeleine reçoit des amis du GLEM chez elle, aux grandes joies de ses 5 enfants qui adorent cette animation constructive.
Celle-ci s’investit de plus en plus dans l’enseignement de l’homéopathie et de l’acupuncture, soutenue dans cette lourde tâche par Jacques BAUR, Simone FAYETON et Andrée PELLETIER.
Le Docteur JARRICOT viendra également la rejoindre en expliquant une nouvelle technique de soins basée sur les « dermalgies réflexes ».
C’est grâce à des médecins comme elle, nous ayant précédés, que nous essayons d’être à la hauteur de nos exigences quand parfois le doute s’insinue dans nos esprits.
Les petites attentions de Madeleine ne s’estompèrent en aucun moment de sa vie.
Elle nous convoqua individuellement en juillet 1993, pour un au-revoir, dans sa chambre du château d’Alba, à l’aube de son éclipse, pour nous donner les dernières recommandations concernant notre vie médicale et personnelle.
Je revois ses yeux bleus profonds qui s’étaient dilués dans un vert pâle. Elle voulait partir en ayant terminé sa mission sur terre, celle d’harmoniser à son niveau, les âmes qui lui avait été confiées.
Le savoir être de Madeleine lui permettait de lire à l’intérieur de nous, avec générosité et de nous stimuler à ressortir le meilleur de nous-mêmes.
Cette femme que l’on dirait "polytâche" actuellement, avait une capacité d’adaptation à toute épreuve.
C’est un doux euphémisme de dire qu’elle était une symphonie à elle seule, avec toutes ses notes que l’on aurait pu croire incoordonnées, mais qui étaient en cohésion et diffusaient une musique harmonieuse et apaisante.
Saurons-nous transmettre cette globalité à nos successeurs ?
Bibliographie
- Le hameau sur la montagne – Edité par sa famille
- Mémoires d’un batteur – Edité par sa famille
- Un médecin légendaire, une thérapeutique innovante, un château merveilleux - Editions SAURAMPS Médical – sous la direction de Yves ROUXEVILLE
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Docteur Chantal VULLIEZ
Présidente du GLEM de 1985 à 2008
Actuellement co-vice- présidente
Octobre 2011.
Article adapté en octobre 2011 par le Dr. Michel MARIGNAN